Maria Portugal-World View www.mariaportugal.net
Home » ONU » Organes principaux » Droits de l'Homme » DH et Entreprises

DH et Entreprises

Vers un traité international sur la responsabilité des entreprises multinational

Vers un traité international sur la responsabilité des entreprises multinational - Maria Portugal-World View

 

 

 

Par: MC/ 03-10-2017

 

Vers un traité international sur la responsabilité des entreprises

multinationales envers les violations des droits humains.

 

 

 

Les textes internationaux déclaratifs en faveur d’une meilleure protection des droits humains et de l’environnement par le secteur économique se sont multipliés ces dernières années.

Parmi ceux-ci, les Principes directeurs de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), élaborés en 1976 et révisés en 2011, proclament que les entreprises multinationales doivent « respecter les droits de l’homme, ce qui signifie qu’elles doivent se garder de porter atteinte aux droits d’autrui et parer aux incidences négatives sur les droits de l’homme dans lesquelles elles ont une part…Dans le contexte de la chaîne d’approvisionnement, si une entreprise s’aperçoit qu’il existe un risque d’incidence négative, elle devrait alors prendre les mesures nécessaires pour y mettre fin ou pour l’empêcher ».

La Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale, rédigée par l’Organisation internationale du travail (OIT) en 1977 et révisée en 2006, recommande aux États comme aux partenaires sociaux de respecter les droits humains formulés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948.

Le Pacte mondial des Nations unies, adopté en juillet 2000 à l’initiative du Secrétaire général, Kofi Annan, incite les entreprises à promouvoir et à respecter le droit international relatif aux droits de l’homme « dans leur sphère d’influence » et « à adopter, soutenir et appliquer dans leur sphère d’influence un ensemble de valeurs fondamentales ». Les signataires s’engagent à « aligner leurs opérations et leurs stratégies sur dix principes universellement acceptés touchant les droits de l’homme, les normes du travail, l’environnement et la lutte contre la corruption».

La Commission européenne a publié en 2001 un livre vert sur la responsabilité sociale des entreprises couvrant la prévention des abus à l’intérieur de l’entreprise, et les relations avec les partenaires, fournisseurs et sous-traitants.

L’Organisation internationale de normalisation (ISO) a édicté en 2008 les lignes directrices de la norme ISO 26 000 sur la responsabilité sociétale des entreprises.

Au niveau de l’ONU, le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a adopté, en 2011, les lignes directrices dites « principes Ruggie » (du nom du rapporteur spécial de l’ONU chargé de la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises) : chaque État se doit de préserver les droits humains dès lors que des atteintes sont constatées sur son territoire ou sous sa juridiction (principe n° 1). Le droit à l’accès au juge doit être garanti (principe n° 13). La responsabilité d’une société dépasse les conséquences de ses activités : « lorsqu’une entreprise contribue ou peut contribuer à une incidence négative sur les droits de l’homme, elle doit prendre les mesures nécessaires pour empêcher ou faire cesser sa contribution et user de son influence pour atténuer les incidences restantes dans la mesure du possible. On considérera qu’il y a influence lorsque l’entreprise a la capacité d’apporter des changements aux pratiques illicites d’une entité qui commet un abus (…) » (principe n° 19).

Le 25 juin 2014, le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a décidé de compléter son approche incitative d’une dimension juridiquement contraignante. Il a créé un groupe de travail chargé d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant pour réglementer, dans le cadre du droit international des droits humains, les activités des sociétés transnationales.

L'Equateur et l'Afrique du Sud ont présenté en 2013, dans le cadre du groupe de travail du Conseil des Droits de l’homme des Nations-unies, le projet d’élaborer un instrument international contraignant pour réguler l´activité des entreprises en matière de respect des droits humains.

Après deux sessions de travail, en 2015 et 2016, où les Etats, une première version du projet de traité sera présentée lors de la troisième session de négociations à Genève, du 23 au 27 octobre. 

 

L’élaboration de ce projet n’est pas sans susciter certaines difficultés :

 

John Ruggie, Rapporteur spécial des Nations unies sur les entreprises et les droits humains, a appelé à une certaine prudence, relevant que les enjeux liés aux obligations juridiques des multinationales sont trop vastes pour un seul traité. Par ailleurs, la mise en oeuvre d’un tel traité se heurterait à la réticence des gouvernements à initier des poursuites judiciaires pour des atteintes aux droits hors de leur propre territoire.

 

A ce stade, cette initiative est essentiellement soutenue par les pays émergents (Chine et  Inde) ainsi que par l'Indonésie et le Sénégal, mais aussi par l’Alliance pour le traité, un mouvement mondial qui rassemble plus de 600 organisations de la société civile et mouvement sociaux (lien vers le site : http://www.treatymovement.com/alliance-pour-un-traite-1/).

 

Ce processus est complémentaire des initiatives de renforcement de la réglementation au niveau national. Ainsi, en France, la loi relative au devoir de vigilance, adoptée en mars dernier (lien vers la loi : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/loi/2017/3/27/2017-399/jo/texte), oblige les entreprises de plus de 5 000 employés en France, ou 10 000 si le siège social est à l’étranger, à publier et mettre en œuvre un «plan de vigilance» pour «prévenir les atteintes graves envers les droits de l’homme, les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes, ainsi que l’environnement» chez elles et chez les sous-traitants ou fournisseurs avec qui elles entretiennent «une relation commerciale établie». Si aucun plan n’est mis en place ou s’il n’est pas respecté, associations et civils pourront saisir la justice. Les premiers plans de vigilance devront être publiés au premier trimestre 2018.